La transformation numérique a bouleversé les codes et les modes de fonctionnement de nos sociétés au cours des dernières décennies. Le digital est aujourd’hui omniprésent, et s’immisce chaque jour un peu plus dans nos vies. Des millions de français se servent quotidiennement de leur smartphone ou de leur ordinateur pour communiquer, se déplacer ou s’informer.

S’il est un formidable vecteur de progrès économique et social, le numérique n’est pas exempt de tout reproche : on estime aujourd’hui qu’à l’échelle mondiale, les usages numériques représentent 2 fois l’empreinte environnementale de la France.

Les entreprises ont une part de responsabilité non-négligeable en la matière, la plupart d’entre elles disposant d’ordinateurs pour que leurs salariés puissent travailler, mais également de serveurs dans le but de sauvegarder leurs données.

À l’heure où l’urgence climatique se fait chaque jour plus prégnante, le numérique responsable prend de l’ampleur et commence à se faire une place dans les rapports RSE et les déclarations de performance extra-financière.

Nous examinerons dans ce dossier thématique les différentes pratiques permettant de tendre vers un numérique plus responsable. 

Mais tout d’abord, quelques définitions. 

Définitions : 

  • Le numérique responsable est une démarche d’amélioration continue qui vise à réduire l’empreinte écologique, économique et sociale des technologies de l’information et de la communication (TIC). Il recouvre plusieurs champs : le Green IT, l’IT for green et la conception responsable des services numériques
  • Le Green IT rassemble les techniques de l’information et de la communication dont la conception ou l’emploi permettent de réduire, à l’échelle de la DSI, les effets négatifs de l’activité humaine sur l’environnement.  
  •  l’IT for green vise à mettre le numérique au service du développement durable afin d’analyser, prévenir et apporter des solutions. 
  • La sobriété numérique désigne une démarche consistant à concevoir des services numériques plus sobres et à modérer ses usages numériques quotidiens. Elle vise donc à réduire l’impact environnemental du numérique. 
  • L’obsolescence programmée est une stratégie industrielle visant à programmer une durée de vie limitée à un produit non-consommable dans le but d’en augmenter la fréquence de remplacement. 
  • Le low-tech  s’oppose au high-tech et se caractérise par la mise en œuvre de technologies simples, peu onéreuses, accessibles à tous et facilement réparables, faisant appel à des moyens courants et localement disponibles (dont la réutilisation ou le recyclage d’objets et/ou de matériaux usuels).

Dates clés :

  • 1972 : invention de l’ordinateur personnel, qui marque le début de la révolution numérique. 
  • 1991 : Création du World Wide Web.
  • 1992 : lancement du projet « Energy Star » au Etats-Unis, dont l’objectif est de promouvoir l’économie d’énergie sur les équipements électriques et informatiques. 
  • 1998 : la convention d’Aarhus consacre la notion d’information environnementale. 
  • 2008 : publication du rapport « TIC et développement durable » par le Ministère de l’Ecologie et le Conseil général de l’environnement et du développement durable.
  • 2011 : Création de l’Alliance Green IT, association loi 1901 qui regroupe les acteurs français du Green IT.
  • 2012 : publication du guide sectoriel « TNIC » par l’ADEME et le Cigref pour faciliter l’évaluation des émissions de gaz à effet de serre des systèmes d’informations. 
  • 2015 : La loi relative à la transition énergétique prévoit des mesures visant à lutter contre l’obsolescence programmée et le Conseil National du Numérique appelle à la convergence entre les transitions écologique et numérique.
  • 2019 : Lancement du premier label français Numérique Responsable pour les organisations privées et publiques.

Chiffres clés :

  • 10% de la consommation électrique mondiale est consacrée au numérique.
  • Le numérique serait à l’origine de 4,2% des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale.
  • 34 milliards : c’est le nombre de téléphones, de tablettes ou d’ordinateurs utilisés dans le monde.
  • La part d’internet dans les émissions de GES à l’échelle mondiale est de 2%, soit l’équivalent de la part du transport aérien.
  • 22 kilogrammes : c’est la quantité de produits chimiques nécessaire à la fabrication d’un ordinateur (avec 240 kg de combustible et 1.5 T d’eau).
  • Entre 1985 et 2015, la durée d’utilisation d’un ordinateur a été divisée par 3.
  • L’intensité carbone des smartphones a augmenté à chaque fois qu’une nouvelle génération de smartphones est apparue.
  • Selon certaines projections, le numérique va doubler ses émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici 2025 et tripler ses impacts environnementaux.
  • Actuellement, seuls 3 à 8% des métaux rares sont recyclés.
  • 85% des ordinateurs usagés peuvent être réparés.
  • 10g de CO2, c’est ce qu’émet une seule recherche sur Google.
  • Envoyer 20 e-mails par jour pendant un an pollue autant que parcourir 1000 km en voiture.

Pourquoi c’est important ? 

Une entreprise soucieuse d’intégrer les objectifs du développement durable à sa stratégie se doit au préalable d’identifier les enjeux qui la concernent. Or, une grande majorité d’entreprises (PME, ETI, Grands comptes) possèdent aujourd’hui leur propre parc informatique, et se trouvent donc directement concernées par la pollution numérique.

D’un point de vue écologique, les deux enjeux principaux du numérique sont les émissions de gaz à effet de serre et les sources importantes de déchets toxiques résultant de la conception des outils numériques, participant à la pollution des écosystèmes et à l’écroulement de la biodiversité.

À cela s’ajoute l’impact des technologies numériques sur les ressources minérales naturelles, et en particulier sur certains métaux rares, non-renouvelables, et pour beaucoup d’entre eux faiblement recyclables : le taux de recyclage de l’indium, du gallium, du tantale et du germanium est inférieur à 1%.

L’extraction de ces métaux est par ailleurs extrêmement énergivore (près de 10% de l’énergie primaire mondiale sert à extraire et raffiner des métaux), et constitue un important facteur de pollution des sols et de l’eau. De nombreuses études font état de conflits liés à l’eau suite au développement de l’extraction des métaux : dégradation de la qualité et accès limité dans des régions déjà arides.

Enfin, cette extraction perturbe l’ensemble des écosystèmes : pour extraire seulement six des cinquante métaux présents dans un smartphone, il est nécessaire de perturber des écosystèmes sur un volume de terre 40 fois supérieur à celui du produit fini.

S’engager dans une démarche numérique responsable permet donc de réduire les émissions de gaz à effet de serre et les déchets toxiques, mais également de préserver les sols, le milieu aquatique et la biodiversité. Cela contribue indirectement à prévenir l’apparition de conflits et de crises géopolitiques dans les pays détenteurs de métaux rares. Par ailleurs, prendre des mesures visant à réduire la pollution numérique de son activité peut contribuer à anticiper les changements de réglementation en matière environnementale. 

Au delà de l’aspect environnemental, le numérique responsable peut être source d’innovation et peut permettre aux entreprises de se différencier de leurs concurrents.

C’est également un facteur de réduction de la structure de coût de l’entreprise : réparer et réutiliser son matériel informatique permet de réaliser des économies parfois substantielles à l’échelle d’un établissement.

Enfin, engager une démarche de numérique responsable est un excellent moyen de fédérer les équipes autour d’objectifs concrets et qui font sens.

Comment s’y mettre ? 

Plusieurs mesures opérationnelles peuvent être mises en place par les entreprises utilisatrices du Numérique pour diminuer les impacts environnementaux de leur écosystème numérique.

Voici une liste non-exhaustive d’actions faciles à instaurer au sein de son organisation : 

  • Opter pour un hébergeur possédant un certificat d’énergies renouvelables ou ayant une politique matérielle de réutilisation.
  • Optimiser la durée de vie de ses appareils électriques en les réparant, en participant à un programme de réutilisation ou en les redirigeant vers la filière du réemploi.
  • Achetez d’occasion et « low-tech » si vous n’avez aucun autre choix que l’achat. Privilégiez les appareils reconditionnés (moins chers et moins polluants), et choisissez des produits dont la consommation énergétique est la plus faible possible.
  • Augmenter la part de smartphones dotés de l’offre «pro-perso» dans le parc de smartphones professionnels.
  • Diminuer le nombre d’exemplaires d’un même document stockés sur les serveurs utilisés par l’entreprise, en privilégiant l’échange de documents via une plateforme synchronisée sur serveur partagé plutôt que par mail.
  • Limiter l’usage du Cloud en favorisant au maximum le stockage et l’usage local de vos données.
  • Installer des moteurs de recherche eco friendly (Ecosia, Lilo, Ecogine, …) par défaut sur les postes de vos employés.
  • Recycler ses déchets électroniques en les déposant dans un point de collecte agréé (Voici la carte des principaux acteurs en France :  www.recyclage-informatique.net ).
  • Adopter une conception responsable des services numériques, mise en place de low-tech.
  • Supprimer régulièrement ses emails.
  • Débrancher les appareils électroniques avant de quitter le bureau.
  • Mettre en place une démarche IT for Green via des services de colocation de Datacenter et de cloud computing permettant une utilisation optimale des ressources matérielles et électrique.
  • Mettre en place des actions de sensibilisation à destination des collaborateurs.

Sources

-https://theshiftproject.org/wp-content/uploads/2018/10/2018-10-04_Rapport_Pour-une-sobriété-numérique_Rapport_The-Shift-Project.pdf

-https://www.cairn.info/revue-projet-2018-2-page-90.htm#

– https://www.lemonde.fr/blog/binaire/2019/10/11/numerique-materiaux-objectifs-climatiques-limpossible-equation/

-https://www.ecoconso.be/fr/content/aurons-nous-assez-de-metaux-rares-pour-fabriquer-nos-smartphones

-https://www.wwf.fr/sites/default/files/doc-2018-10/20181003_etude_wegreenit_d%C3%A9marche_green_it_entreprises_francaises_WWF-min.pdf

-https://www.greenit.fr/definition/

-https://www.greenpeace.fr/la-pollution-numerique/

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